samedi 31 août 2013

27 au 30 août - Russie 1 - En Sibérie

Mardi 27 août

Peu avant neuf heures trente, il y a déjà du monde au poste de douane mongol. Le passage des véhicules se fait au compte-gouttes et les formalités administratives traînent allègrement, au gré du bon vouloir de l'un ou de l'autre à prendre place à son bureau et de consentir à y faire quelque chose.
Ce n'est que sur le coup des midis que nous nous présentons enfin au poste russe après une vingtaine de kilomètres de macadam retrouvé. La pose déjeuner y est annoncée et les grilles se referment sous notre nez jusqu'à quatorze heures. Ayant les mêmes besoins énergétiques que ces braves fonctionnaires, le temps ne nous parait pas bien long face à nos assiettes.
L'heure de la reprise du travail sonnant, Momo et Patricia passent sans encombre les épreuves administratives et à mon tour, je présente aux officiels de service, mon passeport. Annulé par le consulat français de Pékin lors de la constitution du document provisoire permettant d'accueillir le visa mongol qui ne trouvait place dans l'autre passeport, il se trouve amputé de l'un de ses angles et frappé d'un beau cachet « Annulé » sur les deux premières pages.
La discussion sur le pourquoi de la chose s'éternise, et mobilise très vite jusque trois fonctionnaires qui concluent à la non-validité des visas qui y sont contenus. La photo n'a pas été prise, mais je suppose que la couleur blanchâtre de mon visage à cet instant aurait été frappante.
L’explication ne peut passer que par la présentation du nouveau passeport contenant le visa mongol. Y figure également le visa russe demandé à Ulaanbaatar, lorsque, sortant de Chine après tous mes déboires, et plus très confiant envers les capacités du véhicule, je n'envisageais que la solution de rentrer au plus vite en France.
Ce visa ne se termine que dans deux jours. Une chance pour régler le problème immédiat de la légitimité d'une présence sur le territoire russe, mais devoir le quitter dans les quarante-huit heures relève de l'impossible.
En plus, aucun des fonctionnaires présents n'est anglophone. Heureusement, une touriste russe vient à mon secours pour, en anglais, jouer les interprètes.
Après plus d'une demi-heure de palabres, une lueur d'espoir m'est donnée. Le douanier parle de demander une prolongation du visa presque périmé au bureau de l'immigration de Barnaud.
L'après-midi est déjà entamée, Barnaud est à huit cents kilomètres et il reste au visa une durée de vie de deux jours. Tout ce temps pour régler une situation administrative apparemment complexe avec des bureaucrates russes !
Dans les nuages le point culminant de l'Altaï
Momo et Particia, loin de me laisser tomber, encouragent l'accélération du mouvement pour atteindre le bureau de l'immigration au plus vite. Les pauvres verront donc défiler cette superbe route à la vitesse maximale que la raison autorise. Un vrai gâchis. Courant dans un Altaï magnifique avec ses sommets enneigés et les multiples torrents qu'il génère pour le plus grand bonheur des kayakistes, le parcours mérite, au combien, de flâner et chaque virage vous révèle un bivouac.
Momo a même fermé les fenêtres de son camion pour que le fumé des brochettes qui pourraient être ressenti au passage d'un hameau, ne l'incite à lever le pied avant la nuit.
Heureusement, une auberge offrant un espace de bivouac possible mettra fin à son calvaire à une heure encore raisonnable.

Mercredi 28 août

Ce n'est plus une vie. Mes voisins ont proposé le départ pour six heures trente. Ils sont sans pitié pour moi. Aussi, pour ne pas leur faire de peine, j'ai accepté. Mais si j'avais été privé de leur compagnie, c'est bien plutôt que je serais parti, car la nuit n'a pas été très sereine !
Tant et si bien, que le pari a été tenu, malgré une crevaison, d'atteindre Barnaud relativement tôt en fin d'après-midi. L'excellente qualité de la route nous aura bien aidés. L'impératif de localiser les bureaux de l'immigration dès ce jour pour, le lendemain, se présenter à l'ouverture, était l'objectif. Reste à les trouver, dans cette ville devenue importante et méconnaissable depuis mon passage en 2010.
Bivouac devant le stade à Barnaud
Pour une fois, la chance est avec nous. Vitre ouverte à un feu s’apprêtant à repasser au vert, je lance la question à mon voisin camionneur. La file s'ébranle déjà. Sans hésiter, il fait signe de le suivre, me barrant brutalement la route pour s'engager avec son camion de livraison dans la petite rue, déjà à notre hauteur, sur la droite. Il va ainsi se détourner pour, tout naturellement, nous guider jusque devant les bureaux recherchés, bien cachés dans un quartier sans prétention. « Chapeau bas », le camionneur !
Pour compléter notre heure de chances, à cent mètres de là, le parking d'un stade nous offre l'hébergement, en pleine ville.


Jeudi 29 aout

La nuit a été bonne cette fois. Une solution existe obligatoirement. Une prolongation, telle que je l'avais demandée avec succès pour le visa mongol semble réaliste.
Dans un bureau occupé par deux charmantes personnes, les explications recommencent et mes documents font de fréquents allers et retour hors de la pièce. À l'arrivée d'un homme encore jeune présenté comme spécialiste commence un interrogatoire en règle, mené toute fois avec courtoisie. En quelques minutes, les tenants et aboutissants du voyage en cours n'ont plus aucun secret pour lui. Ceci pour en conclure que la seule solution passe par l'acquisition d'un visa de transit, dont la durée ne peut excéder dix jours. Ils seraient éventuellement renouvelables, au moins en partie, dans un autre bureau d'immigration présent dans chacune des villes importantes de l'itinéraire.
Devant mon inquiétude de ne pas avoir le temps matériel d'atteindre l’Ukraine dans cette durée de dix jours, le conseil m'est donné d'utiliser les dernières vingt-quatre heures de validité du passeport à avancer sur le parcours pour demander le transit à Novossibirsk, voir Omsk.
Je vais donc abandonner Momo et Patricia pour leur rendre leur liberté sur les routes du Kazakhstan que nous projetions de parcourir ensemble. Pour moi, commence une course contre la montre sur les routes de Sibérie puis de Russie.
La route est en excellent état jusqu'à Novossibirsk que j’atteins presque avant la fermeture des administrations. Malheureusement un embouteillage trop important en entrée de ville, m'oblige à sortir du flot des voitures pour garer Canasson dans un parking d'immeuble. Le gardien nous y accepte gentiment pour la nuit.

Vendredi 30 août

À compter de ce soir minuit, je suis un sans papier sur le territoire russe. Une situation rêvée !
La visite au centre de l'immigration a un petit goût d'examen. C'est pourquoi le taxi m'y dépose de bonne heure.
Une fois de plus, le personnel est charmant. Après une bonne demi-heure d'attente , seul face au guichet vidé de sa titulaire parcourant les bureaux de divers supérieurs avec mes documents en main, la voici revenue. Souriante elle annonce que le visa transit va pouvoir se faire, mais par contre qu'il va me falloir attendre une heure ou deux. Pensez que j'accepte la sanction avec un certain plaisir !
Lexique russe sur les genoux, je tue le temps sur les fauteuils du hall d'attente. À peine ais-je commencé à m'instruire, que la guichetière accompagnée d'une interprète anglophone viennent à ma rencontre et laissant entendre que deux solutions existeraient dont l'utilisation du vieux passeport dont la validité des visas qu'il contient ne peut être mise en cause.
Pour être bien certain que ma pauvre culture « british » m'est permis de bien comprendre toutes ces subtilités administratives, je suis prié d'attendre un peu la venu d'un interprète, francophone cette fois.
L'homme, jeune, se présente dans un Français qui me laisse penser un instant que nous sommes compatriotes. Mais sa qualité de directeur du centre de l'alliance française de la ville ainsi que de vice-consul auprès de l'ambassade de France à Moscou me renseigne sur sa nationalité.
En présence d'une femme, elle aussi charmante et sans doute très haut placée dans l'administration du centre de l'immigration, monsieur le consul confirme bien la validité du visa de mon ancien passeport et propose que nous allions consulter le directeur du service des douanes territoriales basées à l'aéroport, pour plus de certitude.
Une heure en tête à tête dans sa voiture personnelle, le temps de l'aller et retour, nous ont permis de faire plus ample connaissance. Durant notre déjeuner au restaurant après la visite qu'il prend grand plaisir à me faire faire de son centre de l'alliance Française, cet homme charmant, me parle avec passion de sa ville dont il est natif et de sa Sibérie. Il connaît parfaitement la France ou ses fonctions l'amène à venir et souffre de l'image que nous autres Européens avons de ces contrées lointaines que notre imaginaire nous représente comme sauvages, inhospitalières et peuplées de gens coupés du monde.
La toundra, très marécageuse


La taïga, forêt essentiellement de bouleaux et résineux
Il est bien vrai que les températures peuvent y être rigoureuses, mais guère plus que les extrêmes de certaines de nos stations de ski Françaises. Il est vrai aussi que fin novembre est déjà le plein hiver dans les années normales. En revanche, une ballade à Novossibirsk, ville à peine âgée de cent cinquante ans, ne laisse aucun doute sur le niveau et la qualité de vie de sa population. Une vingtaine d'universités accueillant plusieurs milliers d'étudiants venus de toute la Russie y sont implantées. Certains spécialités y sont même à la pointe de la recherche, notamment dans le domaine médical et n'ont pas leur pareil, ni à Moscou ni même à Paris. Un métro, petit certes, accueil les passager dans ses stations décorées et très personnalisées d'où émane une sensation de bien être. La visite de l'entrée de l'une d'elles, guidé par Grigory, m'a permis de le constater. Reparlant du climat, il a avoué être transi de froid lorsqu'il lui arrive de venir en hiver à Paris!
Omsk
Le parc automobile a explosé ces dernières années et la circulation est devenue très danse en ville.
Détendu, libéré d'une tension énorme, les quatre mille kilomètres de territoire Russe à parcourir encore, ont commencé de défiler sous les roues de Canasson, sans doute ravi de ne plus se faire secouer comme un prunier.
La route devra toute foi être partagée avec un bon nombre d'utilisateurs et la sensation de solitude en direction d’Omsk a totalement disparue.


dimanche 25 août 2013

24 au 26 août – Mongolie 11 – Bientôt la Russie

Samedi 24 août

« On ne change pas une équipe qui gagne », c'est pourquoi hier après midi, avec Canasson, nous avons une nouvelle fois opté pour une petite traverse locale, prenant naissance à quelques petits kilomètres au nord de la ville d'Hovd et qui coupe un long crochet de l'axe principal menant à Ogly.
Pour nous y aider, un jeune motard savoyard rencontré en ville, et lui aussi solitaire, m'a donné quelques pages d'un petit atlas routier mongol trouvé à Ulaanbaatar.
Ainsi, en fin d'après-midi, car nous avons longuement discuté autour d'un café entre compatriotes, j'hésite sur le terrain, entre deux pistes. Il s'agit de rallier le village du même nom que sa grande sœur voisine, Hovd. Une voiture me dépasse et stoppe quelques mètres devant . Un jeune adulte descend et s'approche. Bonne aubaine, ai-je pensé de suite, je vais avoir mon renseignement. Après une très courte explication en anglais, qu'il parle aussi bien que moi..., mon interlocuteur ouvre d'autorité la portière droite, s'installe et avec un grand sourire m'invite à suivre la voiture de Papa. Ils habitent précisément au village.
Seuls cinq kilomètres restaient à parcourir, mais il est sûr que je ne peux suivre le rythme de la voiture. Cela nous donne le temps de faire plus ample connaissance avec mon passager. Il poursuit des études de médecine à la capitale, a tout juste vingt ans et retourne en « fac »le vingt-huit.
Après le franchissement d'un mauvais gué, juste à l'entrée du hameau, nous rejoignons la voiture qui nous attend patiemment. Les occupants, dont le papa, sont sortis et viennent me saluer.
Il est déjà près de huit heures et le jeune futur médecin explique à son père mes intentions d'aller planter le bivouac peu après la traversée du village.
Vous pensez bien qu'il n'en a pas été question.
IMG_0934Quelques minutes plus tard, Canasson trônait dans la cour de la maison pendant que son maître était attablé avec ses hôtes.
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   Ce matin donc, c'est avec une famille élargie à deux oncles et la grand-mère paternelle que je déjeune dans la petite maison. Composée de trois pièces, elle est ma foi, assez bien arrangée. La grande majorité des habitants du village sont Kazakhs, comme ma famille d'accueil. En effet, la frontière d'avec ce pays, n'est plus, à vol d'oiseau, qu'à environ deux cents kilomètres. Ce qui explique que cette région ouest-mongole va devenir au cours de notre avancée, plus Kasaque que Mongole. IMG_0937
Du reste une petite mosquée trône déjà en bordure du village, juste derrière la station-service tenue par le papa. Les Ovoo risquent de se faire plus rares !
Avant le départ, il faut se plier à la tradition maintenant établie, la visite des voisins. C'est mon hôte, qui tout fier, en assure la présentation détaillée et explique l'itinéraire sur la carte apposée à l'extérieur de la cellule.
IMG_0940La voiture paternelle confiée au fils, va me mettre sur la bonne piste pour continuer la petite diagonale entamée hier. Elle offre plusieurs points de vue sur les premiers sommets enneigés de L'Altaï.
L'axe principal, Hovd / Ogly rejoint, il me faut le parcourir sur une dizaine de kilomètres avant de pouvoir m'en échapper à nouveau. Les bas côtés sont peu propices à un arrêt confortable pour déjeuner. Seul un grand espace déjà occupé par trois petits restaurants et quelques Gers m'invite au stationnement.
Pas encore attablé, mais tout occupé à fignoler le parcours routier de l'après-midi, on frappe à ma porte déjà grande ouverte. Un homme est là, accompagné de deux enfants. Invité à monter à bord, un morceau d'appareil électrique m'est présenté comme faisant partie d'une éolienne. L'homme espère que je sois possesseur du matériel nécessaire pour dénicher la panne. Peu compétant en la matière, nous nous retrouvons au dos de la maison au chevet de son matériel démonté, testeur en main. Le pauvre homme aurait mieux fait de s’adresser à Momo et Patricia qui sont passés par là en compagnie des Blots, il y a peu de temps ! L'éolienne n'est pas ressuscitée !
 IMG_0954IMG_0950 IMG_0952  IMG_0959 Une nouvelle petite piste, sur la droite cette foi, longe deux sommets isolés culminant à plus de 4000m d'altitude. Comme elle débouche sur Ogly, je me lance dans cette ultime aventure. Facile au début, il faudra traverser plusieurs gués avant de déboucher sur un immense vallon tapissé d'une herbe très verte étalée en bordure d'un beau cours d'eau. Vu du dernier col franchi, cette gigantesque prairie apparaît couverte d'une multitude de ronds blancs, tels des rosés des près, ce sont des Gers !
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Pour ne pas être assailli d'invitations..., il vaut mieux dépasser le secteur. Une belle bosse surplombant le vallon suivant, moins peuplé, me tend les bras pour la nuit.








Dimanche 25 août
Ogly n'est plus qu'à quarante kilomètres et je pense m'être débarrassé des dernières difficultés de la piste hier. Le rendez-vous avec la miniéquipe rescapée du groupe Chine est prévu pour la fin d'après-midi, j'ai donc tout mon temps pour traîner un peu aujourd'hui. Le subconscient devait être au courant, puisque le premier œil ne s'est éveillé et entrouvert que vers les huit heures et même avec difficulté.
Le vent violent d'hier au soir qui n'a pas manqué de secouer l'embarcation, qui plus est juchée sur son perchoir, a plutôt contribué à me bercer, je pense. Je n'ai pas souvenir qu'il m'ait dérangé bien longtemps.
La piste dès les premières minutes s'avère moins roulante que je ne le prévoyais. La plupart des vallons à traverser me font penser à de vieilles moraines entrecoupées par les lits asséchés des torrents de printemps, dont la traversée est lente, car Canasson n'aime pas se faire bousculer ! En aurait -il même les capacités ? Mais ça, il ne faut pas le lui répéter, car il est sûrement susceptible.
Ce sont maintenant trois nuages de poussière....
Le « clou » a été l'arrivée à proximité d'Ogly ou la dernière traversée de ce style de passage nous a pris presque trois quarts d'heure pour tout juste trois kilomètres.
Enfin, avec mon compagnon nous avons touché au but vers l'heure du déjeuner. Notre escapade solitaire vient de s'achever, puisque nous retrouvons les deux équipages Nahoum et Blots sur la place centrale de la ville juste à temps pour nous rendre ensemble au restaurant.
Ce sont maintenant trois nuages de poussière qui se rapprochent de la frontière ouest à tout juste cent kilomètres. 

Un joli lac à l'approche de Tsagaannuur, le dernier village, est choisi comme point de chute. Sur ses rives, nous rajoutons nos trois 'Yourts » à mi-distance de deux groupes de Gers existants. Très vite nous sommes devenus le pôle d'intérêt des résidents locaux ravis d'avoir trois habitats mobiles à visiter au lieu d'un seul.






Les voisins en visite...

Lundi 26 août

Le bivouac au bord du lac 
  Du sommet, vue sur Tsagaannuur


Se dégourdir les jambes une dernière fois sur un sommet mongol a été la première occupation de la journée. A la fin de la redescende, un jeune de la Ger plantée au pied de la pente, se trouve fort intéressé par mes bâtons de randonnée et exprime le désir de les essayer sur cette même montagne. Je suis en même temps invité à un copieux petit déjeuner.
Rendez-vous étant pris à quatorze heures pour le retour du matériel prêté, c'est la petite machine à laver qui se met en route. Elle intrigue beaucoup deux fillettes venues assister à l’opération.

Grandes habituées de la maison, puisque déjà hier au soir elles étaient présentes pour les visites, elles ne vont pas hésiter un instant pour s'installer à bord de la cellule, alors que le déjeuner est sur le point d'être préparé. Imitant en cela ce qu'elles m'ont vu faire, les chaussures vont rester à la porte, laissant apparaître des chaussettes grandement aérées et qui me font plus craindre pour les coussins que les chaussures elles-mêmes ! Deux croyons et une demi-feuille de papier vont les occuper un long moment.
Un jeune garçon entre dix et onze ans, n'ayant pas osé monter lors des visites d'hier, se présente à son tour et cette fois ne se fait pas prier. Il va même entamer un examen très détaillé des lieux ! Sa curiosité assouvie, il demande à écouter de la musique. Finalement nous serons bientôt six autour de la table ce qui ne laisse que très peu de place à mon assiette. Tout le monde aura droit à un dessert grâce aux petites pommes que je tiens désormais en réserve pour ce genre de circonstance. Pendant ce temps, l'équipage « Blots », détenteurs d'un visa multientrées pour la Russie, a pris le départ pour passer la frontière dès aujourd'hui.
Tout étant rentré dans l'ordre en début d'après-midi nous entamons avec Momo et Patricia de nous rapprocher de la frontière, utilisant pour rallier le village de Tsagaannuur une petite piste contournant le lac du bivouac. Malheureusement, la pluie intervenant à mi-parcours, ne nous permettra pas de profiter pleinement du paysage.

Un nouveau petit plan d'eau, dont le secteur semble regorger, nous servira de refuge pour la nuit, en attendant que demain, s'achève ce long et superbe parcours dans cette accueillante et magnifique Mongolie.  








jeudi 22 août 2013

19 au 23 août – Mongolie 10 – La fin du Gobi

 

Lundi 19 août

Canasson est content ce matin, parce qu’avec la rincée qu'il a reçu cette nuit, beaucoup de sa poussière est tombée sur le devant de la mairie d'Altay. La nuit a été même très fraîche à l'égal de certaines autres de ces derniers temps, mais souvent il faut le dire, en altitude. Sans doute la Mongolie capable de très fortes chaleurs (de 40 à 50°) en a-t-elle fini avec l'été, pour cette année et va-t-elle passer tout doucement vers des fraîcheurs bien marquées, puis à nouveau ces froids extrêmes (-50° avec des pointes à -60°) qui arrivent à décimer des troupeaux et ruiner ainsi les petits éleveurs. Être protégé contre ces catastrophe est un luxe qu'ils ne peuvent s'offrir.

C'est donc avec la laine sur le dos que je pars chercher et réinstaller les deux roues réparées. L'une d'elles doit reprendre place sur le toit, car les fixations sur le panneau arrière, on s'en souvient, ont disparu pour cause d'allègement du porte à faux depuis les ennuis chinois.

Heureusement, le hasard a bien fait les choses en positionnant les deux grilles superposées du frigo juste au-dessus du coffre à gaz. Ainsi, après ouverture de sa porte, et démontage des grilles, une échelle se trouve improvisée. Comme un escabeau à deux marches a été prévu pour monter à bord de la cellule les jours de grosses fatigues, l’accès d'un premier pied sur le bord du coffre à gaz est tout simple. Reste à se rétablir sur le toit, mais avec les sangles de fixation des roues, même pour un vieux guide, c'est encore un jeu d'enfant. Attention toute fois à ne pas renverser l'escabeau au moment de la prise de position sur le coffre, car là, les genoux n'aiment plus du tout les sauts en profondeur !

Après cette gymnastique matinale, qui peut durer lorsque l'on n'est pas pleinement satisfait de son travail et que d'autres solutions sont cherchées, il est temps de reprendre des forces dans un petit resto, pas toujours facile à dénicher dans cette petite ville.

Ensuite une bonne partie de l'après-midi se passe à mettre le blog en ligne.

Et comme après une aussi lourde journée on est fatigué, on décide de remettre au lendemain le départ vers Hovd situé 450 kilomètres au nord-ouest d'Altay.

Mardi 20 août

De joyeux rallyes-men anglais, rencontrés au garage, en pleine retape de véhicules en triste état, m'ont décrit cette route, Altay / Hovd, comme « horrible ».

  Il n'en fallait pas plus pour me dissuader de l'emprunter. J'étais du reste presque complètement décidé à réutiliser mes petites pistes chéries. Seul le timing me faisait hésiter à dévier de l'axe le plus direct, mais finalement, peut-être pas le plus rapide.

Donc pour en finir en beauté avec la visite de ce remarquable et très varié désert de Gobi, un petit détour par une trajectoire presque parallèle, plus au nord, doit permettre de longer ses plus hautes dunes. Donc je tente.

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Il faudra toute foi souffrir les 100 premiers kilomètres, incontournables, sauf à y passer beaucoup du temps que je n'ai malheureusement plus. La sortie de l'axe infernal est donc décidée à Sonduult (en fait au moins   20 km plus loin!) pour gagner Bayan-Uul puis Hömorit au pied de l'immense cordon de dunes. Ensuite en continuant cet axe, la vue sur le bas des deux lacs, Har nuur et Har-Us nuur, promet un beau spectacle.

IMG_0823IMG_0824IMG_0827 IMG_0826 La petite piste de déviation tient tout de suite ses promesses en nous baladant dans des secteurs tous plus jolis les uns que les autres tout en étant très roulante.

IMG_0831 IMG_0838 Au centre du village d'Hömorit, pour ne pas risquer l'erreur de sortie, la confirmation du choix est demandée à un brave motocycliste. Je suis perplexe quant à la direction complètement sud qu'il m'indique alors que je cherche moi, plein ouest.IMG_0857   Enfourchant son engin, avec un grand sourire il m'invite à le suivre. Jusqu'à la sortie sud du village, rien ne m’inquiète, pensant que le départ de la piste que je cherche s'y trouve. Après deux bons kilomètres sur un axe où je ne voulais surtout pas IMG_0861  m'engager, parce que regagnant « l'autoroute », la piste s'infléchit légèrement sud-ouest à une bifurcation assez peu visible. Mon guide met pied à terre et par un dessin sur le sable de la piste, explique qu'ainsi, en contournant par le bas, la très large colline du village, l'itinéraire sera beaucoup moins accidenté. Le brave homme n'avait pas pensé (et moi non plus!) qu'ainsi, il m'éloignait définitivement du pied des dunes.

IMG_0843 IMG_0853 Une fois de plus la Mongolie a été superbe, arrivant, avec ses paysages sublimes, surtout lorsque les sommets enneigés des hauts sommets de l'Altay sont apparus en arrière-plan, à faire oublier la tôle ondulée qui n'a pas manqué de faire quelques apparitions.

IMG_0862 Choisir le bivouac ne fut pas bien difficile, sauf à se décider parmi un choix infini.

(N 47,4892 E 093,8191)

 

 

 

 

Mercredi 21 août

Il était tout prêt hier au soir, ce beau lac Har nuur, le premier des deux à se présenter sur l'itinéraire.

IMG_0866 Cinq ou six kilomètres peut-être. Il brillait au soleil couchant et la tentation avait été forte de pousser Canasson jusqu'à lui.

Bien m'en a pris, car ce matin, ce ne sont pas moins de vingt-cinq kilomètres qu'il fut nécessaire de parcourir pour l'atteindre (en ligne droite s'il vous plait !...car je vous entends d'ici les tordus!).

IMG_0870  Un accès facile a permis une baignade rapide dans une eau très claire recouvrant un sol majoritairement sablonneux.

Si ces vingt-cinq premiers kilomètres ont bien contribué à faire passer le petit déjeuner, dès le premier lac atteint, dix kilomètres ininterrompus d'un parcours sans le moindre cahot, aussi confortable qu'une autoroute.

IMG_0875 IMG_0880 Pour le deuxième lac, le projet fut abandonné dès que j'ai eu réalisé que , bordé d'une belle montagne, la piste qui le rejoignait par le nord risquait de ne pas se poursuivre en bordure d'eau pour rejoindre la route d'Hovd. Donc un peu avant Chandmani, mon compagnon et moi avons obliqué vers les montagnes de l'Altaï dont certaines sont couvertes de neiges éternelles, à l'ouest du grand axe desservant Hovd.

À la poste de midi (enfin un peu plus, pour les raisons que l'on sait...) alors que le café est encore fumant dans le verre, une moto s'approche et s'arrête sous ma fenêtre. Les deux occupants se présentent à la porte et sont donc invités à partager la pause café. Mais, se contentant d'un petit gâteau, ils semblent attendre de moi quelque chose que je ne comprends pas.

IMG_0877  En leur emboîtant le pas, la simple vue de la roue arrière de leur engin, crevée, éclaircit le propos. Ils ont des rustines, mais pas de colle dissolution ; et moi non plus ! IMG_0879Seule une colle néoprène spécial caoutchouc et 

 

 

  cuir pourrait éventuellement dépanner. La roue est démontée et en découvrant les réparations précédentes de la chambre à air, nul ne s'étonnerait de la fuite de l'une des précédentes interventions. Ils furent des plus heureux de ne pas avoir à faire cette réparation-là ! La colle semble avoir fait l'affaire !

Une nouvelle foi, quelle bonheur d’avoir pu ne pas être qu’un simple visiteur auprès de certains de ces gens, leur rendre un peu de tout ce qu'ils nous donnent!

 IMG_0884 Pour finir en beauté ce Gobi, une surprise peu agréable attendait « Canasson »au bas de la descente des deux lacs : Le Sable, pour ainsi dire pas encore rencontré de tout ce trajet en désert!

Traumatisé depuis ses déboires avec ce matériau au Turkménistan, il appréhendait de le retrouver dans ce Gobi. Par solidarité, je partageais parfaitement ses angoisses !

Et bien, sur plusieurs kilomètres,  nous avons fait bonne figure. Canasson n'a jamais inquiété son maître !

IMG_0888   La tentative de rallier cette ville par une petite piste passant par Manhah et Duut se soldera par un échec au niveau de grottes que vient de visiter un groupe de quatre ou cinq familles, finissant de dîner aux derniers rayons du soleil.

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Tous me dissuadent de tenter de continuer, heureux que je plante le bivouac à leur côté.

En faisant payer les entrées, j'aurais gagné ma journée !

 

 

Jeudi 22 août

Un mauvais souvenir m'était resté d'une virée en Camargue en raison de ses résidents principaux prêts à tout pour vous perforer de tous côtés. Et bien je crois avoir trouvé son homologue mongol. Toute ma journée passée dans la montagne a été une chasse incessante de ces petites bestioles.

La présence d’un petit torrent pouvait expliquer, mais dans des lieux élevés et arides, ça m'a surpris. Enfin, il suffit de fermer les fenêtres ! IMG_0893 Au bivouac, j'y suis tout de même resté la matinée entière à régler les affaires courantes dans ce cadre qui me plaisait bien malgré les féroces insectes.

En début d'après-midi, remonter jusqu'à Hovt par le grand axe partiellement goudronné ne m'enchante toujours pas malgré l'impossibilité de passer par Duut.

IMG_0895 IMG_0896 IMG_0897 IMG_0902 C'est pourquoi, sans carte précise de la région en redescendant des grottes, Canasson à feu vert pour s'engager sur une série d'excellentes pistes qui, non pressées de redescendre jusqu'au grand axe en bas dans la vallée, lui sont parallèles et offrent de très jolis points de vue sur le deuxième des grands lacs non atteints hier, le lac Har-Us nuur.

À ce petit jeu, finit par venir le moment d'une bifurcation. Une des branches remonte vers la montagne. Son orientation est très proche de ma visée en direction du village Duut. La Mongolie n'en étant pas à l'heure des loisirs, toute piste a une raison fonctionnelle d'exister : rallier un lieu d'habitat. Il n'en fallait pas plus à mon fidèle adjoint, pour, sans presque l'intervention d'une main étrangère, s'y engager, peut-être aurons nous une deuxième chance pour notre projet initial !

 IMG_0907  IMG_0911IMG_0901   IMG_0908 La piste, imprévisible tant le terrain est tourmenté, franchit allègrement sans offrir de difficultés tous ces accidents de terrain paraissant de loin, souvent problématique.

Le passage d'un petit col tracé dans le secteur d'énormes blocs de granit empilés est un ravissement.

C'est beaucoup moins ravissant de constater, après avoir enchaîné franchissement de crêtes et vallons, que la piste se complique et que le village serait actuellement dans mon dos. Un demi-tour s'impose pour trouver la bifurcation obligatoirement existante, mais non vue. La logique de la topographie des lieux laisse entrevoir un emplacement possible.

Il n'a nullement été besoin de chercher longtemps. Une moto, comme très souvent chargée de gros sacs et de deux personnes, se présente sur mon arrière. D’où arrivent-ils ? Très probablement de la piste montant de mon bivouac précédent , mais impraticable en voiture. Arrivée à la hauteur de la portière chauffeur, je ne manque pas de lui faire signe de bien vouloir stopper. L'explication est rapide et simple : nous y allons, il suffit de nous suivre. Ainsi remis sur le bon chemin raté un kilomètre avant le demi-tour, nous nous lançons dans un grand contournement de la montagne nous séparant du village, alors que les motards, remerciés de m'avoir patiemment attendu, s'engagent sur un raccourci inenvisageable pour Canasson, aussi fougueux soit il !

Toute fois, à dix kilomètres du but, une succession de passages, tous plus scabreux les uns que les autres, me fait hésiter puis me décider au renoncement définitif. La ville d'Hovt ne sera pas rejointe par la petite piste la reliant à Duut, mais la randonnée fut superbe.

IMG_0913 La récupération facile de l'itinéraire de début d'après-midi par une nouvelle et assez bonne piste plus ouest, nous remet sur la direction d'Hovt. À la sortie du franchissement d'une petite bosse, comme elle joue les premières loges sur le lac Har-Us nuur de l’autre côté de la vallée, l'emplacement de la nuit est tout désigné, dès fois que l'éclairage du matin permette de mieux voir !.(N 47,64326 E 092,02301)

 

Vendredi 23 aout

IMG_0918 Les eaux bleues du lac ne se sont pas dévoilées vraiment avec le soleil levant. Tant pis pour la photo. L'axe principal d'Hovt en pleins travaux de goudronnage n'est plus très loin et la ville n'est qu'à quarante-cinq kilomètres. Seulement cinq kilomètres d'un magnifique bitume seront utilisables. Pour le reste du parcours, il aura fallu se contenter des pistes côtoyant les travaux, c'est dire si ce fut un régal !!! Plus de deux heures pour arriver en ville...

 IMG_0915 Enfin, ça y est, j'y suis et peut vous faire un petit coucou par le blog en utilisant, comme très souvent dans ce pays, la connexion Wifi non sécurisée qui couvre le secteur de la zone administrative.

Après quoi, je vais goûter la gastronomie locale et m'avancer en direction de Olgiy ou nous avons projeté de nous retrouver avec les couples Momo et Blot, seule équipe rescapée du groupe chine.

IMG_0917 Les "Blots" ayant un projet différent du nôtre à partir de la Russie, nos routes s'y sépareront.